MYRTHO

Posté le par Louis dans Récit et littérature




Myrtho,


C'est un lagon d'aurore aux reflets enfantins.

T'en souvient-il, c'est l'île Bourbon, c'est l'île de la vanille et des Fournaises, l'île du grand souffleur et des jujubes…

Quand Tu pêches, là-bas, mon Enchanteresse :
Tu prends, juste entre tes bras si blancs, de grands thons à nageoires jaunes :
Comme ça, comme en éden…

C'est sur cette île, jaillie de l'océan, volcanique expression :
L'île de la Réunion.

Tu te rappelles, Divine, tu te rappelles, on l'appelle ainsi car toutes les Communautés y coexistent harmonieusement :

Pagodes bleues, mosquées d'or, Eglises devant laquelle s'était arrêtée, miraculeusement, une coulée terrible de lave :

Magma, magmaÂ…

Tu souffres ?
Pourquoi souffres-Tu, mon Adorée ?

Tu me racontes l'abeille de la fameuse orchidée qu'est la vanille :
Fragrance insaisissable, comme Toi, comme tes tresses d'or mêlées aux grappes de mon Désir ardent :
J'ai soif de Toi, après Toi languit mon âme.

Ce jour-là, nous accomplissions un tour de l'île, de St-Paul à St-Denis, mais Toi :
Tu ne songeais qu'à m'embrasser, à mon cœur défendant ;
J'avais la trouille de t'aimer, comme un juvénile passant, l'adolescent transi, benêt de l'amour et tout fou de ton visage parfait, parfait :
Oui, le trésor de ton visage est dans ma mémoire…

T'en souvient-il, moi assis sur les grands canons d'antan, pour des photographies bouleversées.
Toujours, Ta main de tendresse cherchait la mienne : pourquoi ?
Parce que je suis fragile, fragile comme tous ceux qui portent les fardeaux :
Tous les porte-faix de la vie.

Et mon fardeau, c'est d'être assoiffé de TOI.

Tu m'abreuvais d'une caresse et d'une caresse Tu me couronnais :

Tous les joyaux, tous les joyaux joyeux, je les avais dans tes yeux d'infinie gentillesse et de passion sans retourÂ…

Je n'avais pas voulu goûter aux ailerons de requins et tu riais de moi,
Le rhum blanc, Charrette, qu'il s'appelle, (avec une autre orthographe) :
C'était dangereux…
Trop !

Alors, mon esprit se serait évadé, mais vers la Guyane :
Ce pays de lumière et de vie.
Vers Bénédicte, que j'avais surnommé Nédi.

Toi, je t'ai toujours appelée Myrtho, car tu tiens de la déesse plus que de la femme :
Et puis, au fond, pour moi :
Féminité et divinité ont une fâcheuse, une implacable, une irrémédiable tendance à se :
ConfondreÂ…

Pour un peu de Tendresse, pour qu'aucune ride ne vienne troubler ton front de joie etÂ…
Je l'avoue :
De JouissanceÂ…

Un soir, sur cette île Bourbon, j'avais repensé à Paul et Virginie :
Sur l'île-sœur : L'île Maurice…

Ce qui me passionne, ma chérie, mon petit frisson :
C'est la solitude insulaire :
Mais en particulier ici :

Au Sud : rien avant la Terre Adélie, au Nord :
C'est la mystérieuse,
Asie,
Vers l'ouest :
Madagascar, l'île-continent…

Bref : pour moi, rien que TOI :
Ma tant chérie, mon adorée d'amour !

A chaque fois, l'escale à Djibouti me séduisait :
Ce point le plus chaud du globe :
Aucun cours d'eau permanent.

Une fois, en 1994, mon Papa et moi étions descendu dans ce désert :
Jusqu'à l'aéroport :
Le vent plus chaud que l'air était terrible, Siroco de là-bas :
Plus brûlant que les moteurs de lavions…

Mais je pensais à la Mer Rouge :
Celle aussi de la Bible : celle que les Hébreux traversèrent pour échapper à l'esclavage, au fouet du chef de corvée !

Aujourd'hui encore, je goûte chaque jour un caillou de cette Mer du miracle :
Il est toujours salé…
Il trône dans une longue boîte en bois d'amourette et d'acajou :
Près de lui :
Une pierre où du végétal fossile apparaît :
Cette pierre a été cueillie (fleur millénaire, fleur des origines) au pied du Buisson Ardent, au Sinaï.

Myrtho, mon trouble total :
Il fallait prendre garde, quand nous partions nous baigner dans le lagon, aux requins :
Mais nous, nous sommes deux dauphins, dans l'onde bleue.

Le soir venait et Tu reposais sur moi :
Comme échouée, naufragée d'amour et abandonnée…

Je te l'ai toujours, toujours dit :
*** Jamais je ne T'abandonneraiÂ…

Jamais, mon amour tout-profond !

Mon esprit voguait et soudain :
Je me retrouvai en Martinique, sur la plage de Ste-Anne :
Mes collègues et moi n'avions dans la vie qu'un souci, torturant, tourmentant s'il en est :

Dans le hamac que nos assistantes avaient apprêté entre deux troncs genre cocotiers :

allions-nous choisir un sorbet citron vert ou coco ? –

Tu me ramenas à la réalité, à Toi :
Ma sublime, Reine de tous mes instincts, de tous mes instants :
Tu me pris contre Toi pour m'enivrer :
Soudain, tout soudain :
Tout consolé…

Tu me demandas de ne plus me rendre en Afrique de l'Ouest ni au Moyen-Orient :
Je n'en avais, de toutes les manières, plus aucune envie…

Une fois revenus dans la verte Europe :
C'est Toi qui m'embrasais :
Plus torride que ces contrées ensoleillées…

Un jour j'ai décidé de t'appeler Néfertiti :
Ce qui signifie, en égyptien ancien :
La Belle est venueÂ…
Toi, ma Princesse d'Héliopolis, qu'on désigne sous le nom d'Amarna :
La ville d'AtonÂ…

Un autre jour, je te nommerai Dévi :
La Déesse-amour, la protectrice du foyer :

Le pendant maternel et doux de Kâli :
La terrifiante dévoratrice…
En hindouismeÂ…

Un autre jour encore, une nuit d'Idumée :
Je te nommerai Athor :
Déesse du panthéon égyptien du fertile amour !

Mais, in fine, s'imposa à moi l'image du désert :
Je me souvins du verset :
je la conduirai au désert et je la séduirai –

Du jaune et du bleu, tout l'embrasement des ciels fumants :
Cieux ultramarins :

Ton corps c'est mon Temple, je repose en Toi, Tu reposes en moi.

Ton corps d'ivoire halluciné où je m'abîme : naufrage délicieux et irrémissible.

Ton corps YIN, absolument :
Aucune fureur, aucune colère, aucune tristesse :
L'apaisement de tous mes élans de vie et de bonheur !

Tu vis dans le Temple de mon cœur :
Ta voix me tranquillise, comme la pudeur ;
Comme la pudeur, tu t'offres à mes pauvretés ;
A mes fragilités, à toutes mes fragilités :
Tu apportes les sources de l'avenirÂ…

J'étais étendu, saurien, ophidien :
Sur ma peau glissait les ruissellements des gestes qui dénudent, qui dénouent.

Sur ma vie venait se poser l'immanence de Toi :
Rien à chercher, que l'abri éternel de tes sanctuaires.

Myrtho, Néfertiti, Dévi :
Prends-moi dans tes voiles, dans tes draperies.
Donne-moi l'oubli des forcenés, des sanguinaires :

Remplace en moi toute démission par ta passion de nous,
Remplace en moi tout abattement par les seuls battements de tes cils dans la lumière, de ton cœur enfin…

EnfinÂ…



Je T'aime de tout mon être, ma Princesse Aurore, Gulnoza, Sitora, Niguicha, Natacha…
Zukhra, Arianna, Arianna, la Gracieuse !

C'est la nuit.
Je dois prier.
Je dois y croire.
Je dois être …
PaternelÂ…

Tu me l'as dit, avoué :
je veux que TU sois paternel ! –

Alors, grâce à ton besoin, à cause de tes demandes :

Je suis devenu Père…

Je ne parle pas ici d'être le Père de nos enfants :
Disons pas seulement.

Tu m'as demandé d'être l'Alfadir de la mythologie nordique :
OdinÂ…

Tu m'as demandé d'être, non point Père, mais le Père ;
Non point d'être le Père :


Mais d'être :

Paternité !

PaterÂ…

Tu es mon épouse et mon enfant, ainsi en as-Tu décidé…


C'est Toi qui m'a révélé à moi-même et depuis, je suis devenu la Force,
Depuis je suis devenu Protection :

Moi qui ne cherchais qu'à me réfugier entre tes bras :

C'est dans mes bras que tu trouves la totale Confiance :
La Certitude absolue, l'absolue Certitude :

D'être à l'abri…



Louis Polèse

Société des Gens de Lettres de FRANCE
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Louis Polèse
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